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ESPACES interculturels CINEMA
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11 mars 2010

ACHILLE ET LA TORTUE: L'ARTISTE EST UN PARADOXE

C'est un film d'artiste sur la vie d'artiste qui comme le dit le réalisateur Japonais TAKESHI KITANO "renvoit à un des paradoxes les plus commun de la philosophie dans le monde de l'art". Si le spectateur aborde cette histoire au premier degré, il sera trés déçu et trouvera pleins de faiblesses dans la mise en scène du réalisateur ( artiste peintre lui même par passion), malgré qu'il ait pris la précaution de donner un tître très explicatif (comme c'est son rôle) pour le mettre en situation de comprendre.

Ce tître  renvoit l'oeuvre cinématographique réalisée à la philosophie du mathématicien Grec ZENON qui  affirme que le Grand ACHILLE ne pourra jamais battre une tortue dans un cent métre si au départ on l'handicape de 99, 999 mêtres, alors que sans cet handicap la logique serait qu'il gagne facile (sauf accident imprévu) . C'est donc un paradoxe ( une proposition contraire à l'opinion publique et à sa logique). Dejà là, on voit que l'artiste cinématographe KITANO se comporte comme un " créateur" pour qui l'ecrit est un moyen d'expression qui doit ramener à ce qu'ARAGON appelle un " développement rethorique". A partir de là, le réalisateur, nourri par la culture japonaise, ne cherche pas à apparaître comme un poéte mais comme un philosophe qui s'efforce de démontrer que la thèse de ZENON s'applique à la vie des artistes.(Alors que pour ARAGON les images  que le poëte met dans ses oeuvres-écrites, peintes sculptées ou autres- sont "des moyens d'expression qui n'ont pas pour le vrai poëte le caractère d'une obsession qui se poursuit au delà de la chose exprimée qui raménerait à un développement rethorique").

Ce film est une oeuvre dont le contenu est "subjectif", c'est à dire qu'il a été introduit pour exprimer un point de vue personnel que des spectateurs pourront finir par partager.( si ce contenu avait été " nevrotique" cela aurait signifié que le réalisateur, inconsciemment aurait, à travers cette oeuvre, extérioriser ses fantasmes).

Cela m'améne aussi à préciser que, pour moi, parler des artistes en général n'a pas de sens. Un artiste est ou un créateur ou un névrosé. Il est par exemple un créateur Historien quand dans le produit ( l'oeuvre) qu'il crée, il valorise le contenu ouvert à l'histoire ou Il est un créateur ( peintre, sculpteur, dessinateur , architecte , cineaste, etc) lorsque dans le produit créée, il s'attache dabord et essentiellement aux problèmes de couleurs, de formes, de facture picturale plus que sur le sujet et l'histoire

Et il est "poéte" quand lui importe d'abord de valoriser la structure et le contenu en refusant de se faire le porte parole d'une idéologie précise, ou de raconter comme le névrosé sa vie et les fantasmes qui le hantent ("même la structure est de la poésie" Aragon).

Sans cette différenciation, il me parait difficile d'étudier en quoi consiste une oeuvre comme ce film par exemple.

ACHILLE ET LA TORTUE est aussi une création artistique qui résulte de choix ( sujet, mise en scène et choix intermédiaires : technique, style, support, format, vocabulaire, décor, personnages, couleurs, éclairage, construction, lignes, proportions, mouvement...) . je laisse à chacun faire cette analyse complète du film pour dire ou pas si , au niveau de la structure, c'est une oeuvre de qualité comme je le pense.

J'en reviens donc au contenu de ce film et donc sur les réflexions de KITANO à propos du statut d'artiste (ici artiste-peintre). D'une manière générale il est trés critique vis à vis des oeuvres japonaises actuelles qui, selon lui, se limitent trop souvent à n'être que des produits industriels basés sur le profit (ex le père collectionneur et revendeur) et trop inféodées auxs pratiques occidentales, figées dans la stylisation des Grands courants artistiques à la mode en Amérique et en Europe ( cubisme, action painting, pop art, body art, etc) . KITANO a décidé de traiter cela  par la dérisoion humoristique en faisant de son héros un peintre raté. Sa critique porte aussi, à travers le symbole du Beret, sur les mangas japonais qui sont de plus en plus un produit commercial et de moins en moins des créations artistiques.

Lorsqu'il aborde le problème de la vie d'artiste (le statut d'artiste), il devient émouvant  et pathétique pour faire ressortir la dureté de la société aussi rapide à encenser qu'à bruler, écraser, broyer celles et ceux qui ne rentrent pas dans le moule (MAHISU et sa FEMME) qui fait que la famille après avoir pousser l'artiste dans ce mêtier, le croyant capable de créer des chefs-d'oeuvres, a honte en le voyant qui s'obstine alors qu'il est poussé à la mendicité (envers sa fille) pour s'acheter du matériel afin de pouvoir continuer de peindre des oeuvres dont personne ne veut. Le Japon est une société  ou tout échec est passible de la mort (scuicide) car c'est le pire des déshonneurs qui rejailli sur toute la famille, même si on exerce un mêtier d'art et que l'on accepte de rester vivant, pauvre et incompris.

Les dernières reflexions de KITANO portent sur l'Art lui même. Son propos est sans détour " La valeur de l'art est surestimée", ce n'est qu'une illusion et son essence reste inaccessible. "Nous vivons une époque où celui qui rève de devenir artiste-peintre est mieux considéré qu'un employé de  bureau.. on nous force à croire en nos rèves et qu'ils doivent devenir réalité. ..Ce qui pour moi reste fondamental c'est de continuer à travailler, contre vent et marées, et s'investir dans l'acte créatif pour que ça devienne de l'art en soi et un processus qui se suffit à lui même. La joie réside dans la création elle même. La souffrance de l'artiste est grande quand l'artiste créateur manque d'inspiration". C'est cela qu'il apporte comme réflexion dans son film en disant aux futurs  artistes si vous vous lancez dans l'art pour décrocher la gloire vous serez toujours battu comme ACHILLE l'a été ( à cause de son talon).

Je trouve que Kitano n'insiste pas assez dans son film sur le fait que l'on ne nait pas artiste, même si on a un don inné comme Michel-ange ,Mozart, Picasso, Aragon..., on le devient mais pour le devenir il y a des passages qui restent incontournables comme l'apprentissage qui s'acquiet aussi par l'imitation de ce que l'on considère comme des oeuvres majeures ( pour ne pas employer le mot chef-d'oeuvre), puis la maitrise des techniques existantes et passées, apprendre à maitriser tout un tas de mode d'expression pour s'en libérer et devenir soit même créatif, un artiste créateur.

il faut, comme l'a dit ARAGON, "avoir une idée  et une conception trés haute de l'idée de création artistique. "c'est un épique combat contre la matière qui détourne la chose exprimée. Ce combat se mène contre les contraintes sociales, contre l'ignorance et l'incompréhension, contre les préjugés et contre soi même; bref contre les errements en lui même  et contre la création extérieure. C'est une lutte permanente contre tous les éléments contradictoires du monde, de la société et de l'homme qu'il est. Le drame c'est le conflit des élèments disparates quand ils sont réunis dans un cadre réel où leur propre réalité se dépayse" (ARAGON)

Les images du Film Achille et la tortue forment un ensemble, un "raccourci" pour atteindre la sensibilité du spectateur et lui donner accès à la représentation suggérée par le Réalisateur Japonais qui lui aussi est de ce fait un artiste-créateur.

Se contenter de voir ce film au premier degré pour seulement se divertir c'est se condamner à avoir "la vue faible des oiseaux de nuit" comme dirait le biographe de Michel-Ange.

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