ZABRISKIE POINT : D'UNE ETRENELLE MODERNITE
Vu les films de la semaine ( en dehors d'INVICTUS) je pense que l'on peut s'octroyer un moment de cinéma Famillial avec un Grand film d' ANTONIONI -sorti en 1970- mais toujours d'une modernité dont feraient bien de s'inspirer nos jeunes réalisateurs : "Vous introduisez des enfants dans le monde, puis ils grandissent tout seuls. De temps en temps vous les réunissez et c'est toujours un plaisir de les revoir" -Antonioni- ZABRISKIE POINT est de ceux-là, avec pour les vieux nostalgiques soixantehuitard une illustration musicale des Pink-floyd ("Grateful Dead", "The Youngbloodes...), Jerry Garcia
Un film c'est toujours une réalisation d'ensemble qui réclame un sujet fort sur un thème précis, de préférence lié au questionnement du moment, mais aussi une mise en scène qui suppose des choix sur la technique, le style, les decors, les personnages, les costumes des dialogues soutenus, et on vous passe l'éclairage, le son, etc. bref, un travail d'équipe de talent qui maitrise un savoir faire afin d'harmoniser au plan esthétique le film .
ZABRISKIE est de ces films dans le quel tout jusqu'au moindre détail n'est pas là par hasard ou pour combler un vide. Par contre il arrive que pour des raisons politiques les producteurs aient fait sauter des passages. Par exemple ici l'avion qui traine une banderole portant en américain l'inscription "FUCK YOU AMERICA". Mais comme tout le film, issue de 68, est un questionnement sur où on en sera du monde en l'an 2000 et de nos contradictions, il était difficile de tout changer sans remettre en cause le film lui même ( il est sorti en vidéos en 86 et 2003 ?)
Ce film en trois séquences porte sur la colère de la jeunesse étudiante mais laquelle ne réussit déjà pas à communiquer entre elle pour se mettre d'accord sur ce qui faut faire de révolutionnaire pour que les choses changent. Lorsque l'un d'entre eux décide de fuir cette société industrielle qui suscite les conflits et la violence, par peur de ce qui peut lui arriver, c'est pour atterir dans le désert de ZABRISKIE Point avec ses grands espaces horizontaux où ne subsistent que des publicitées murales de l'amérique gratte -ciel. Mais ce nouvel Eden est loin de répondre aux attentes, malgré l'amour qu'il rencontre, il faut encore poursuivre cette fuite par les airs à la recherche du bonheur. Et bien sur comme ICARE, notre militant étudiant révolutionnaire finira par se bruler les ailes et retomber brutalement sur terre. La vie simple et l'amour fou ne sont pas de ce monde, ça reste un monde poussiéreux, éphémère, désolant de réalité. Et quand la survivante compagne réussit à revenir dans ce monde des contraintes, on assiste à une soumission bourgeoise de cette étudiante idéaliste basée sur le bonheur moderne arificiel où tout est factice. Une Amérique en trompe l'oeil dans laquelle surconsommation et violence font bon ménage pour détruire la dernière parcelle d'humanité et de dignité humaine.
Ce film contestataire des années 70 ne risque pas de vous faire mourir d'ennui pendant 110 minutes. ANTONIONI est de ces créateurs engagés qui vous oblige à tout observer en prenant le temps, qu'il s'agisse de corps enlassés ou de la nature fut elle désertique ( le mythe des grands espaces à l'heure de la conquète de la lune). Il porte un regard critique et narquois sur la société américaine et nous offre un regard d'artiste avec un travail de caméra qui produit du sens pour le spectateur qui regarde (car l'histoire y est ) tout en preservant l'idée que ça ne reste pas un simple objet de consommation esthétique en gommant l'éthique de la trame. Il a su adapter le contenu au contenant pour en faire un travail artistique afin de produire de la beauté qui se rapproche de la pureté. Après, ce film devient ce qu'en font les spectateurs dans l'espace et le temps.
Regalez- vous !
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